L'État français intègre le nucléaire dans ses emprunts verts - Sfen

L’État français intègre le nucléaire dans ses emprunts verts

Publié le 18 juin 2025

Le nouveau document-cadre pour l’émission d’obligations vertes souveraines françaises, publié fin mai, permettra de financer la prolongation de la durée de vie des réacteurs et la construction de nouvelles centrales.

Le Trésor marche finalement dans les pas d’EDF. Les futurs green bonds de l’État français pourront allouer une partie de leurs fonds à des projets nucléaires alignés sur les critères de la Taxonomie européenne, alors que le secteur était auparavant exclu de ces instruments. L’ouverture d’une nouvelle source de financement importante, permise par l’évolution de la position des marchés à l’égard de cette dette à vocation environnementale.

La France émet des obligations vertes depuis 2017, pour un montant total qui a dépassé les 70Mds€ fin 2024. L’exclusion de fait du nucléaire a longtemps répondu à la demande des investisseurs sur ce nouveau marché où l’atome a eu du mal à trouver sa place. Les rapports d’allocation des fonds produits par Bercy précisaient ainsi que les financements accordés aux activités de recherche du CEA n’étaient pas directement en lien avec le nucléaire.

Le sentiment de marché a évolué depuis 2022. Le succès de Bruce Power et Ontario Power Generation (OPG) au Canada a ouvert la voie à de premières émissions aux États-Unis (Constellation Energy, mars 2024) et depuis peu en Asie (KNHP, mars 2025). Le gouvernement canadien a été le premier État à lever des fonds pour des travaux de prolongation de la durée de vie de réacteurs et de la R&D sur les SMR, également en 2024.

Orienter le marché vers le financement des nouveaux réacteurs

En France, EDF a intégré ses activités nucléaires dans son document-cadre pour les green bonds dès l’été 2022. Son dernier rapport annuel comptabilisait plus de 3,5Mds€ mobilisés via trois titres en 2023 et 2024 ; avant que depuis le début de l’année le groupe n’accélère la cadence avec des émissions successives en janvier (440M€), février (480M€) et début mai (1,25Md€).

Cette dernière opération a ouvert un champ nouveau pour le financement de projets nucléaires. L’un des titres émis par EDF vise en effet directement le projet Hinkley Point C : une paire de réacteurs en construction, alors que la très grande majorité des green bonds présents sur le marché se cantonnaient aux travaux sur des infrastructures existantes.

L’État a vraisemblablement à l’esprit de tester plus en avant l’appétit des marchés pour les nouveaux réacteurs, les green bonds offrant de ce point de vue une prise de risque modérée et une bonne liquidité. Une ressource non négligeable dans l’équation du financement des futurs EPR2, si l’on songe que ces obligations vertes ont couvert plus de 10Mds€ de dépenses publiques à vocation environnementale en 2023. ■

Par Paul Kielwasser (Journaliste)

Image : ministère des Affaires économiques – @ MANUEL COHEN / Manuel Cohen / Manuel Cohen via AFP

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